Tribune exclusive de Dominique Nouvian Ouattara, première dame de Côte d’Ivoire
Fléau d’ampleur mondiale, le cancer touche plus durement encore les pays d’Afrique, où la maladie n’est souvent détectée que trop tardivement. Le renforcement de la prévention et des soins constitue donc, plus que jamais, une priorité pour notre continent.
Avec près de 8,8 millions de victimes par an, le cancer est la deuxième cause de décès dans le monde, selon l’OMS (Organisation mondiale de la santé). Si la maladie n’épargne aucun pays, sexe, tranche d’âge ou condition sociale, elle se révèle particulièrement préoccupante dans les pays en développement, où se déclarent 60 % des nouveaux cas, d’après le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer). Intimement lié au mode de vie, ainsi qu’à de mauvaises conditions d’existence, le cancer est plus mortel en Afrique (69,8 % contre 65,3 % dans le monde en 2012), où la pauvreté et le manque d’information favorisent à la fois son apparition et l’aggravation de la santé des malades. D’ici 2030, le nombre de décès pourrait même approcher le million faute de mesures de prévention adéquates, selon les études épidémiologiques.
Pourtant, quatre cancers sur dix pourraient être évités en adoptant une alimentation saine et en réduisant la consommation d’alcool et de tabac. La cigarette demeure, on le sait, un des facteurs de risque les plus importants puisqu’environ 20 % des décès par cancer — dont 70 % d’origine pulmonaire — lui incombent dans le monde. En Afrique, 26 % des cas de cancers sont provoqués par des infections chroniques comme le VIH/Sida, l’hépatite B ou le diabète. Pour lutter contre le cancer, il convient donc de combattre ses causes profondes. C’est justement pour définir les contours de cette mission vitale pour notre continent que j’ai participé au séminaire régional de haut niveau sur la promotion des programmes de plaidoyers et de sensibilisation au cancer. Cet évènement qui s’est tenu le 1er et le 2 août derniers à Ouagadougou, a été organisé par la Première Dame du Burkina Faso, en collaboration avec l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI).
Développer les actions de prévention et de soins
À cette occasion, j’ai eu l’honneur de présenter à mes consœurs Premières Dames, aux membres de l’OCI, ainsi qu’à ses partenaires, les mesures mises en place en Côte d’Ivoire, tant d’un point de vue préventif, que curatif et prospectif.
Comme dans tous les pays d’Afrique, le cancer constitue un grave problème de santé publique avec 15 000 nouveaux cas diagnostiqués chaque année, dont une majorité affectant des femmes (8 000). Dans 75 % des cas, la maladie se révèle mortelle en raison d’une découverte tardive. Au moment de créer un Programme national de lutte contre le cancer en 2008, l’une des priorités du gouvernement ivoirien a donc été d’organiser des campagnes de sensibilisation et de dépistage dans le pays. En dix ans, 1,5 million de femmes ont ainsi été sensibilisées sur les cancers du sein et du col de l’utérus, qui font le plus de victimes. Parmi elles, 50 000 ont été dépistées, et 16 000 jeunes filles ont été vaccinées contre le HPV (Human papilloma virus), à l’origine de nombreux cancers du col de l’utérus.
En complément des actions de prévention, la prise en charge des malades a elle aussi été renforcée avec la formation de personnels de santé, la création d’un cursus d’oncologie médicale en 2016, l’acquisition de nouveaux appareils de diagnostic et de traitement, le subventionnement du traitement médical des patients et l’inauguration du premier Centre national d’oncologie médicale et de radiothérapie de Côte d’Ivoire le 18 décembre 2017. D’autres projets d’envergure sont actuellement en cours, comme la construction d’un centre régional d’oncologie à Grand-Bassam, et de deux centres de radiothérapie à Bouaké et Daloa.
Le cancer, 4 fois plus mortel chez les enfants africains
En tant que présidente-fondatrice de Children of Africa, je ne peux m’empêcher d’insister sur les ravages du cancer chez les enfants. Ils sont 160 000 chaque année dans le monde, à être frappés par cette maladie. Le sort des enfants d’Afrique m’émeut particulièrement, car seuls 16 à 20 % d’entre eux guérissent en Afrique subsaharienne, contre 75 % dans les pays développés. S’ils ne représentent que 5 % de tous les cas en Côte d’Ivoire, les cancers infantiles sont d’autant plus dramatiques qu’ils affectent les êtres les plus vulnérables de notre société et provoquent une détresse sans nom dans l’ensemble de la famille concernée. C’est pour eux notamment, qu’en mars 2018, l’hôpital mère-enfant de Bingerville construit par la Fondation Children of Africa, a été inauguré. Les enfants atteints d’un cancer pourront y recevoir les soins adaptés dans l’aile d’oncologie pédiatrique prévue à cet effet. Ils pourront également y suivre des traitements chimiothérapiques et ambulatoires de jour. Il s’agit pour nous, de leur donner une raison de continuer à rêver, et à espérer en la vie !