Afrique de l’ouest : les navires étrangers raclent le fond des océans

Alors que vient de s’achever une conférence dédiée aux océans à Nice, en Afrique de l’ouest les pêcheurs protestent contre la prédation étrangère des ressources marines. Chaque semaine, des chalutiers européens, chinois, turcs et russes raclent le fond des eaux, ne laissant que le menu fretin aux locaux. Cette surpêche tarit non seulement les ressources disponibles pour la population mais également détruit de nombreux emplois.

La 3e Conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc) a eu lieu à Nice la semaine dernière, à l’initiative de la France et du Costa Rica. Lors de cet événement, une table ronde a été organisée pour débattre de la gestion durable des pêches et des systèmes alimentaires aquatiques. Une action essentielle à la préservation de l’environnement marin ainsi qu’à la lutte contre la faim, la malnutrition et la pauvreté dans le monde. Des intervenants venus d’Afrique de l’ouest ont pris la parole pour exposer la situation critique de leur région en matière de ressources halieutiques.

Les bateaux chinois passent sous les radars dans les océans

Parmi les intervenants au sommet sur les océans de Nice figuraient plusieurs représentants d’associations. Ces derniers ont fait le déplacement depuis l’Afrique pour porter la voix des communautés de pêcheurs traditionnels, principales victimes de la surpêche. Ils ont dénoncé le pillage des ressources marines par les chalutiers étrangers, notamment européens, turcs, russes et chinois. Ceux-ci ont l’habitude d’opérer en toute illégalité au large de l’Afrique de l’Ouest. Les bateaux chinois, en particulier, pêchent dans des zones interdites ou réservées aux pêcheurs traditionnels, en prenant soin de désactiver leur système d’identification, pour ne pas se faire repérer par les patrouilleurs des marines de la zone (Sénégal, Gambie, etc.).

Les usines de farine et d’huile de poissons ratissent le menu fretin 

Outre les bateaux étrangers qui vident les eaux des gros poissons, les usines de farine et d’huile de poissons ratissent ce qu’il reste. À savoir les petits poissons pélagiques de la région (sardinelles, chinchards, bongas, maquereaux…) qu’elles transforment en nourriture pour d’autres poissons d’élevage (saumons et bars notamment) ou pour les animaux domestiques (porcs et la volaille). Une petite portion rentre dans la composition des cosmétiques et des compléments alimentaires pour le marché européen.

Les poissons deviennent cher sur le marché à cause de la surexploitation des océans 

Il ne reste donc presque plus rien pour les populations locales. Or, plusieurs dizaines de millions de personnes en Afrique de l’ouest dépendent de la pêche et de l’aquaculture pour leurs moyens de subsistance. Comme en Gambie, petit pays qui doit faire face à la prédation de ses eaux malgré un littoral de seulement 80 kilomètres. À cause de la surpêche dans les eaux de la région, les poissons et crustacés coûtent cher sur les marchés locaux. Les populations ne peuvent plus avoir accès à ces produits de la mer, alors qu’ils constituent leur principale source de protéines.

Faute de pouvoir vivre de la pêche, les jeunes prennent le large 

Par ailleurs, de nombreux artisans n’ont plus d’activités comme en Mauritanie, un pays de 5 millions d’habitants où la petite pêche génère plus de 66 000 emplois directs et indirects. Impuissants face aux gros chalutiers et à la raréfaction des prises, ces pêcheurs se retrouvent au chômage, sans perspective d’avenir. Certains préfèrent  prendre le large pour s’offrir une meilleure vie en Europe. C’est ce que font la plupart des jeunes gambiens et sénégalais.

Un appel à davantage de moyens pour surveiller les océans 

Une solution à la crise migratoire serait donc de mettre fin à la surpêche et à la pêche illégale pour protéger ceux qui vivent de la mer. Les participants de l’Unoc ont lancé un appel aux grandes nations. À la France, en particulier, pays hôte et fortement présente en Afrique. Ils demandent notamment à Paris davantage de moyens pour surveiller les eaux territoriales. Aussi, les pêcheurs réclament une pression accrue des pouvoirs publics sur les fermes aquacoles pour qu’elles trouvent des alternatives à l’alimentation de leurs poissons, comme la farine d’insectes. Du côté des ONG environnementales, on exhorte les pays à multiplier les aires marines protégées et à pousser pour une exploitation durable des stocks mondiaux de poissons.