Vivement critiquée pour les bénéfices énormes qu'elle engrange, l'industrie pharmaceutique veut redorer son image et, notamment, calmer le débat concernant les frais marketing des sociétés en question, souvent très élevés. Pour ce faire, dès le 1er janvier 2014, il sera interdit de distribuer des produits dérivés publicitaires aux médecins.
Une décision importante qui ne ravit pourtant pas tout le monde que celle prise par la Fédération Européenne des Industries Pharmaceutiques. Si le but est de redorer l'image des laboratoires et, surtout, de calmer les débats concernant les interventions des visiteurs médicaux, le choix de bannir les produits dérivés déplaît fortement aux manufacturiers européens.
La question du budget marketing de l'industrie pharmaceutique
La prescription d'un médicament plutôt qu'un autre est ce qui est au centre de la stratégie marketing des laboratoires pharmaceutiques. Une stratégie vivement décriée par les médias et qui coûte aux laboratoires plusieurs milliards de dollars. Un budget possible seulement grâce aux bénéfices engrangés par les laboratoires et les sociétés.
Par exemple, pour la seule année 2004 aux Etats-Unis, 57 milliards de dollars ont été dépensés par les laboratoires pharmaceutiques dans le cadre de la promotion de leurs produits. Si dans ce chiffre sont comptés les visiteurs médicaux, il y a aussi, dans le budget, toute une série de petits gadgets comme des clés USB et des stylos avec la marque du laboratoire dessus.
Plus de marketing que de recherche dans l'industrie pharmaceutique ?
La distribution de gadgets est, certes, une stratégie commerciale classique. Les grandes sociétés, et même les plus petites, ne se privent pas de se faire de la publicité en distribuant par-ci par-là des petits objets tamponnés avec leur logos. Mais ce qui choque est que, en 2004, le budget marketing représentait 24 % du chiffre d'affaires total aux Etats-Unis.
En comparaison, toujours en 2004, 29,6 milliards de dollars ont été alloués aux départements de Recherche et Développement des divers laboratoires américains. Marc-André Gagnon remarquait, en 2008 dans un article sur le Figaro, que Pfizer allouait, en pourcentage du chiffre d'affaires, plus de budget marketing que Pepsi.
Un marché perdu pour les manufacturiers de produits dérivés
La décision d'interdire la distribution de gadgets est très intéressante du point de vue d'image. Cela interdirait que l'on puisse dire que la distribution des gadgets, et donc la stratégie marketing des laboratoires pharmaceutiques, influence l’avis des médecins et la prescription des médicaments. Mais la question économique va outre la question de santé et d'économie de la santé.
L'Association Européenne des Produits Promotionnels s'est insurgée contre cette interdiction formelle effective dès le premier janvier de l'année prochaine. En cause, met-elle en avant, le problème d'un marché important qui se ferme d'un coup.
Selon l'Association, ce sont près de 500 millions d'euros de chiffre d'affaire par an, distribué dans les divers secteurs tels que la production de clé USB ou la production de stylos, qui sont perdus. De fait, ce sont surtout ces entreprises manufacturières qui souffriraient de cette décision.
L'impact du produit dérivé remis en cause
Hans Poulis, à la tête de l'Association Européenne des Produits Promotionnels, remet totalement en cause le principe qu'un simple stylo puisse influencer l'avis d'un médecin. D'autant plus que, selon lui, l'argent dépensé en produits dérivés estampillés des logos des laboratoires pharmaceutiques est largement inférieur à celui dépensé dans d'autres domaines, toujours pour le marketing.
Une position soutenue aussi par Elvira Jurado-Castell, à la tête d'une association allemande de producteurs de produits dérivés, qui considère absurde de penser qu'un médecin puisse être amené à prescrire tel ou tel médicament seulement car la société lui a offert un stylo.
Pourtant, des études académiques estiment qu'il y a un réel impact de ces petits produits sur l'avis des médecins. Impact qui vient s'ajouter à celui des divers séminaires organisés par les laboratoires pharmaceutiques.