Le Maroc est secoué depuis près de deux semaines par des manifestations de la Gen Z. Celle-ci réclame principalement une amélioration du système de santé, qui peine à répondre aux besoins des citoyens, avec notamment des infrastructures défaillantes, une pénurie de médecins et des pratiques douteuses. Jeunes et médecins appellent à une véritable réforme de ce système de santé.
Depuis près de deux semaines, les jeunes marocains battent le pavé dans plusieurs villes de leur pays, dont Rabat et Casablanca, pour réclamer une amélioration de l’emploi, de l’éducation et surtout du système de santé. Porté par le collectif Gen Z 212, et soutenu par des associations de patients et des syndicats de médecine, ce mouvement de protestation a été déclenché par la mort par césarienne de huit femmes en dix jours à l’hôpital Hassan-II d’Agadir.
Le système de santé du Maroc présentent de grandes lacunes
Pour les jeunes marocains, ces décès tragiques sont la conséquence des défaillances structurelles et chroniques d’un système de santé à bout de souffle, nécessitant une intervention urgente du gouvernement. Les données disponibles, notamment fournies par le Centre marocain des droits de l’homme, dressent un portrait contrasté du système de santé marocain, révélant des lacunes importantes malgré certains progrès.
Les grandes villes concentrent l’essentiel des équipements médicaux
On note d’emblée des infrastructures vieillissantes, avec 30% des établissements hospitaliers ayant besoin de rénovations majeures, selon le ministère de la Santé. Ces centres de santé sont également inégalement répartis, tout comme l’équipement médical de pointe qui reste concentré dans les grands centres urbains. Casablanca, Rabat et Marrakech concentrent 70% des scanners et IRM du pays, alors qu’ils ne représentent que 30% de la population. Le Maroc fait aussi face à une pénurie critique du personnel médical, avec 7 médecins pour 10 000 habitants, alors que l’OMS recommande au minimum 10 médecins pour 10 000 habitants. Cette pénurie est aggravée par l’exode des médecins à l’étranger, où ils trouvent de meilleures conditions d’exercice de leur métier.
Les hôpitaux du Maroc gangrenés par la corruption et la mauvaise gestion
On note en outre que malgré l’extension progressive de la couverture médicale, les dépenses de santé à la charge directe des ménages pèsent toujours 40% du total selon la Banque mondiale (2024). C’est l’un des taux les plus élevés de la région MENA. A titre de comparaison, ce taux est de 16% en Tunisie et 18% en Turquie. Parmi les autres maladies du système de santé marocain figurent la négligence des professionnels, la mauvaise gestion, la corruption et la faiblesse des ressources financières. Sur ce dernier point, il faut souligner que le budget alloué à la santé ne représente que 5% du budget général pour 2025, une proportion insuffisante qui maintient le système dans un état de déficit structurel. C’est pour changer cette situation que la jeunesse manifeste dans les rues et se fait entendre bruyamment sur Internet depuis une dizaine de jours.
Un appel à une réforme profonde du système de santé
La Gen Z marocaine revendique notamment l’équité d’accès aux soins de santé, la transparence budgétaire par la publication détaillée des budgets régionaux de santé, l’évaluation indépendante de leur utilisation, ainsi que la participation des collectifs citoyens à la gestion et au contrôle des politiques sanitaires locales. Pour leur part, le comité marocain des droits de l’homme (CMDH) et les associations de médecins appellent à une réforme urgente du système de santé. Celle-ci devrait, selon eux, être menée par une personnalité compétente à la tête du ministère de la Sante et une commission nationale pluridisciplinaire. Ils estiment que cette réforme est indispensable pour restaurer la confiance des citoyens et garantir leur droit à la santé et à la vie.
Le Maroc investit massivement dans le sport
Déjà sous pression des syndicats de pharmaciens et de médecins depuis plusieurs semaines, le gouvernement a déjà prévu une réforme du système de santé. Ce plan prévoit notamment une décentralisation de la gestion des structures sanitaires, la formation de plus de médecins, des investissements massifs dans les facultés de médecine, la rénovation de la moitié des hôpitaux dans les prochaines années et la fourniture de milliers de lits.
L’exécutif gagnerait à satisfaire la jeunesse marocaine s’il souhaite sauver sa peau et éviter le scénario népalais. Il a également intérêt à s’exécuter pour que la Coupe d’Afrique Nations (CAN) 2025 prévue se dérouler dans ce pays en décembre prochain. Les manifestants ont appelé à boycotter cette compétition qui aspirerait tous les investissements, avec la Coupe du monde 2030, co-organisée avec l’Espagne et le Portugal.