Loi Duplomb : la pétition et le débat pourraient ne pas suffire à abroger le texte

La pétition contre la réautorisation de l’acétamipride, proposée par la loi Duplomb, a recueilli plus de deux millions de signatures dimanche. Mais ce succès pourrait ne pas suffire à empêcher la promulgation du texte par Emmanuel Macron. La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun Pivert a déclaré que la pétition ne peut pas amener à une abrogation.

La pétition contre la réintroduction de l’acétamipride dans l’agriculture française, proposée par la loi Duplomb, a recueilli plus de deux millions de signatures à la date du dimanche 21 septembre. C’est le minimum requis pour ouvrir un débat à l’Assemblée nationale sur cette loi décriée depuis plusieurs mois mais votée par le Parlement en juillet dernier. Il s’agit donc d’une grande victoire pour les opposants au texte et en particulier à l’acétamipride.

L’acétamipride au cœur de la contestation contre la loi Duplomb 

L’acétamipride est un néonicotinoïde, une catégorie d’insecticide utilisée pour lutter contre les suceurs de sève, tels que les pucerons, les charançons et les balanins. Il sert notamment à protéger les betteraves à sucre et les noisettes. L’acétamipride est considéré comme toxique pour la biodiversité, en particulier pour les oiseaux et les insectes, y compris les pollinisateurs ( les abeilles principalement). Ce produit présente aussi des risques pour la santé humaine, en raison de sa neurotoxicité, de ses effets cancérigènes et de son caractère de perturbateur endocrinien. Interdit en France depuis 2018, mais autorisé ailleurs en Europe jusqu’en 2033, ce produit chimique pourrait être réintroduit grâce à la loi Duplomb. Celle-ci suscite une forte opposition d’élus et de citoyens, qui rappellent qu’il existe des alternatives, telles que les rotations de cultures, les semis tardifs et les variétés résistantes.

Laurent Duplomb se dit prêt à un débat, mais pas à retirer l’essence de sa loi

En dépit du succès de la pétition, le sénateur à l’origine de la loi contestée reste droit dans ses bottes. Laurent Duplomb estime qu’il ne faut pas faire « courir une concurrence déloyale aux agriculteurs français » quand les voisins, les « Allemands, Italiens et Espagnols vont pouvoir utiliser des produits qui vont leur permettre d’avoir une forme de rentabilité économique et de rendements ». Il soupçonne les opposants de vouloir en réalité « la fin de l’agriculture française ». Laurent Duplomb se dit prêt à un débat, mais pas à une abrogation de sa loi ni à son dépeçage.  « Il y aura sûrement un débat organisé à l’Assemblée pour dire ce qu’on a dit pendant six mois », exaspère-t-il.

Pour Yaël Braun Pivet, le débat ne pourra pas revenir sur la loi Duplomb votée par le Parlement 

La présidente de l’Assemblée Yaël Braun Pivet confirme que ce débat « ça va se faire », probablement à la rentrée politique. Mais elle avertit que « le débat ne pourra en aucun cas revenir sur la loi votée » car « on ne peut pas avoir des légitimités qui s’opposent ». D’une part deux millions de Français qui ont exprimé leur opposition à la loi Duplomb, d’autre part l’Assemblée nationale qui a voté le texte. La chambre basse du Parlement se compose de 577 représentants du peuple. Par conséquent, « tous ces signataires de pétition sont également représentés aujourd’hui à l’Assemblée nationale » note Yaël Braun Pivert. La députée de la 5e circonscription des Yvelines précise en outre qu’ « il n’y a pas qu’eux » puisque des millions d’autres Français soutiennent la loi et ne se sont pas exprimé à travers cette pétition.

« Une longue bataille qui ne fait que commencer »

Ce dimanche, la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier a déclaré que « la pétition contre la loi Duplomb est le plus grand mouvement social de ces derniers mois », mais qu’elle n’est qu’un pan d’« une longue bataille qui ne fait que commencer ». Franck Rinchet-Girollet, porte-parole de l’association Avenir santé environnement (ASE), propose de son côté de rentabiliser sur cette initiative en créant une convention nationale citoyenne pour la transition agricole. « Ça nous semble être un outil satisfaisant car il fait appel à l’intelligence collective », a-t-il expliqué. Son association a participé samedi à la troisième édition de l’Appel de La Rochelle pour réclamer une sortie de la France des pesticides de synthèse. Le cortège a réuni proches de victimes, citoyens, militants écologistes, médecins et élus.